26.11.08

Novembre 1

Depuis toujours, je lis de la fiction.
Enfant, quand l’ennui m’étouffait trop, j’allais dans la bibliothèque domiciliaire, sortait un roman, et je lisais; c’était ma solution; je n’ai jamais eu beaucoup d’initiatives. La vie fictive d’êtres autres et irréels oblitérait la mienne. J'y oubliais ma nullité. C’était donc, à court terme, un excellent remède.
Encore aujourd’hui, quand la haine et le mépris que j’ai de moi m’affole trop, j’ouvre une fiction, de préférence sans lien avec mes études. Le soulagement perdure après des milliers et des milliers de pages; je m’annihile dans l’ivrai.

La vie des occidentaux est faite de choix, et de persévérance dans ces choix.
Puisque mon choix le plus persévérant fut la lecture et que, comme on l’a vu, c’était à peine un choix; puisque cette lecture n'avait aucune incidence directe sur ma vie sauf pour l'assimilationd e ces termes superfétatoires ornant ma parole, ornement faisant croire à une intelligence chez moi (artifice pernicieux!); puisque cette activité, ayant très peu de points de contact avec la trame de ma vie, me faisait orbiter à la plus grande distance d’elle possible : on peut dire que l'essence de mon existence est à son minimum. Minimumissima.
Je rédige ces mots, je me rends compte que je suis dans l’erreur.
Il y a en effet des minima bien plus impressionnants, des abstractions d’existences vraiment complètes. Des gens sans amis, sans parents, sans mots, avec des logements vides, des têtes proches de kelvin 0. Des moines bouddhistes à l’abstinence sublime. Des schizophréniques catatoniques. Des autistes.
De tout ceux-là, il n’y a que les moines qui sont ainsi de par leur volonté; les autres son excusables par des tares hors de leur contrôle.
Je n’ai, quant à moi, aucune excuse.
Mon minimum d’existence est remarquable par cette médiocrité des mi-parties qu’il affectionne; il s’abandonne de velléité en velléité, sans jamais sombrer dans la grande dèche noire; les géniteurs secourent alors leurs mol avorton.

Ça n’a pas le charme débraillé des rutilantes épaves héroïques des Réjean Ducharme, des VLB, des autres conteurs des êtres d'exception de la déchéance, revoyez vos jugements sur la réussite, grandeur dans la boue, etc.

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