Je consulte de temps en temps un webmazine qui se veut principalement dédié aux hommes, tout particulièrement les urbanites cossus d’âge moyen. En ce webmazine écrivent certaines chroniqueuses, dont la quête ultime est de révéler les mystères angoissants de la nature féminine à ces confus Sigisbées. En effet, la Femme, entité ubique subdivisée en de multiples sous-organismes, (qui auraient tort de se considérer comme des individus à part entière) pose cette énigme essentielle, ontologique même : Que veut-elle?
Je me ravise; peu nous importe ce que femme veut. La seule question admissible est la suivante : Que veulent les Femmes de la part des hommes?
Allons! Cette question suppose encore non seulement trop de spécificité selon chaque sous-organismes, mais encore l’idée, farfelue certes, de volontés immanentes qu’auraient les femmes. Voyons! Après le féminisme, fléau innommable dont les ravages le sont autant*, il ferait beau jeu de supposer pareilles sottises. Les femmes, et c’est connu, obéissent à ces mécanismes secrets que nos vaillantes chroniqueuses tentent d’exposer aux yeux ravis des galants malchanceux. Ces mécanismes sont dictés en toutes choses par les impératifs du Féminin, l’Éternel du nom.
Voici donc la vraie question : Comment obtenir les femmes en contentant l’Éternel Féminin?
C’est ce dont la plus brave de nos Écuyère, bravant les foudres divines en dérobant ce fruit de la connaissance gnostique, disserte en ces pages.
Moi, être dénaturé et indigne d’appartenir au Sexe, ne saurait vous dire si cette éminente Dispensatrice de Vérité est entrain d’atteindre à la Source du Féminin.
Mais justement, en tant qu’être dénaturé, je ne conçois pas que de pareilles stratégies puissent fonctionner.
En me départant quelque peu des humeurs fielleuses que me donnent les Divagations sur la Femme, j’ai réalisé qu’en fait, ce type de chronique est symptomatique d’une grande carence de la société moderne, quelque chose dont la perte est à déplorer et dont nous sommes en droit d’être nostalgique;
La Déchéance de l’Art de la Conversation.
(Terrible! C’est terrible.)**
Je paraphrase ici le webmazine susmentionné : « Votre entrée en matière devrait toujours, toujours être à propos d’elle parce que, convenons-en, les femmes aiment discourir à propos d’elles-même »
Clairement. L’Éternel Féminin exige des idolâtries; ne craignez rien, mes preux! Puisque toutes les femmes se font dicter leurs conversations par leur Surentité Supérieure, les réponses données seront toujours insensiblement les mêmes. Vous voyez! Tout simple. Quelques trucs passe-partout et hop! On est en affaire. Nul doute qu’ainsi vous trouverez cette compagne auprès de laquelle votre cœur soupire, cette intime confidente modelée comme pour vous convenir, cette âme vous épousant, vous complétant, vous transfigurant! Ah! Tout ça grâce à un coup d’œil savamment dosé et quelques sésames tout-aller! J’ai peine à y croire.
Ok, je pense que j’ai épuisé ma réserve de fiel.
Sérieusement, là.
Le jeu subtil et délectable de la séduction est, dans un climat social où il nous en coûte trop d'individualiser notre comportement, réduit à une série d’instructions comme pour une recette de dîner Kraft; c’est fade, c’est bête, c’est tout préparé d’avance et ça goûte les agents de conservations.
Je veux bien admettre qu’établir un premier contact soit difficile : mais un peu de naturel, d’originalité et d’habileté à cibler devrait faire le compte.
Anyway, ce genre de recherche du couple à tout prix, ce n’est que l'angoisse qui se met en scène. On conspue la solitude, qui seule permet de savoir qui est-on, ce que l'on veut, où va-t-on. Avec un calme répit sans socialisation, tous le bruit de l'Autre cesse, la bourbe redescend, les eaux redeviennent claires, et on peut lire en soi-même bien plus aisément. Cette sérénité est un véritable appât; les intentions sous-jacentes disparues, les gens seront bien plus enclins à engager une conversation signifiante avec vous. Et peut-être qu'un heureux dénouement en sera le salaire. ***
*Probablement parce que dans les faits, ces ravages sont aussi imaginaires que ce fameux Éternel Féminin.
** Vraiment terrible.