27.10.08

Code Secret

[…] Dans l’extrait étudié, nous sommes mis en face d’un moment particulièrement pénible pour le spectateur, à savoir l’auto-humiliation (pourtant involontaire) du principal protagoniste. En effet, celle-ci, confrontée à la perception peu flatteuse qu’a d’elle le maître, s’effondre en larmes, larmes suscitées par des remarques qui sont en elles-même plutôt anodines. Nous démontrerons que cette brutale chute de tension sociale dont l’héroïne subit le contrecoup est en plus grande partie la résultante de ce face-à-face avec son propre reflet.En effet, ce reflet est en si grande dichotomie avec ses intentions et l’essence de son être que l’héroïne, complètement déstabilisée, devient une enfant fragile, friable même, pour qui toute critique est une atteinte mortelle à l’âme. C'est que, comme nous l'apprendrons au chapitre suivant, l'écart entre le soit et l'autre, l'ego et l'image est irréconciliable et l'impuissance dans laquelle se sent l'héroïne d'offrir à l'Autre une image au moins adéquate lui donne l'impression de n'exister qu'incomplètement.
Dans l'extrait, l’auteur utilise une focalisation complètement interne, la vitesse du récit se ralentit à l’extrême sans toutefois devenir pause, et la panique du protagoniste nous englobe. Une succession de souvenirs à demi-étouffés point dans l’esprit de l’héroïne, souvenirs présentés non pas sous la forme d’une déchronologie typique, mais plutôt comme des sortes de cris sourds. Bien que faisant appel au passé, ces cris ne sont donc pas des analepses au sens propre du terme. Ils prennent forme de réminiscences vagues, presque informes (« elle y touche… je me brise… ils riaient de moi… Moi et les autres… Mes insuffisances », l.39 à 46) et l’héroïne, en proie à sa tristesse incontrôlable, ne sait pas elle-même en quoi consiste cette tristesse.

Nous pouvons séparer l’extrait en trois mouvements.
Dans le premier mouvement, une phrase que l’héroïne semble considérer comme banale (« qu’est-ce qu’il a, mon ton? » l.15) pique le professeur qui, se sentant interpellé, contrefait railleusement notre protagoniste. Ce malentendu bénin annonce un premier écart entre intention et réception.
Dans le deuxième mouvement, l’héroïne, (que nous avions connue fière au début du roman) s’aplatit littéralement devant le maître, avoue sa panique. La relation maître-disciple se change alors en relation juge-accusé, au moment où le maître dit cette phrase désarmante, mais lourde d'implication si l'on considère l'emploi des pronoms : « Je vous dit ceci entre vous et moi » (l. 29). Débute alors le sous-mouvement de la marée d’émotion qui finira par submerger l’héroïne au mouvement final. […]

Aucun commentaire: