26.11.08

P-L ; (Novembre 5)

Je t'aime et tu m'empêches de sombrer.

Novembre 4

(Je ne suis pas une poète...)

Mort d’une saison.
Ci gît-elle, ensevelie
Sous la brume faite linceul.

Un bourdon n’a, lui,
Pour suaire seul,
Que les gravats
De la sente;

Ma marche lente
Martèle son glas.

Novembre 3

Dimanche dernier, j’ai traversé les deux cimetières de la montagne avec mon amour. Nous sommes entrés par la porte Decelles, avons grimpé ce premier versant, et somme sortis par le cimetière juif. À l’apex de notre ascension, nous nous sommes assis quelques temps sur un banc de pierre. Avant de se siéger ainsi, j’ai remarqué que le banc était en fait une tombe conjugale, dont seulement la première mie y reposait, si on se fiait à l’épitaphe.
Cette même épitaphe révélait que les époux étaient (sont encore, à moitié) homosexuels. C’était la première tombe gaie que je voyais de ma vie.
J’ai aussi remarqué que le dossier de cette stèle-stalle s’était fendu; il était raccommodé avec une colle qui avait jauni. Le badigeon était ainsi très visible, striant le marbre sans élégance. Ce trait de résine m’a paru infiniment triste.
La pierre était trop froide pour nos fondements, nous avons repris notre marche après peu de temps.

Novembre 2

Depuis qu’il enseigne, on ne le voit plus qu’avec des vestons. Avant, il se contentait de la formule chemise-cravate. L’acquisition du veston a dû venir avec l’atteinte de ce nouveau palier.
Il me semble toujours merveilleux de voir de quoi est faite la satisfaction dans la vie des autres. Après tout, pourquoi pas?

Le mépris dans les regards qu’il me réserve, œillades qui semblent toujours me trouver par hasard, ne m’empêche pas de savoir de quoi il est fait.

Novembre 1

Depuis toujours, je lis de la fiction.
Enfant, quand l’ennui m’étouffait trop, j’allais dans la bibliothèque domiciliaire, sortait un roman, et je lisais; c’était ma solution; je n’ai jamais eu beaucoup d’initiatives. La vie fictive d’êtres autres et irréels oblitérait la mienne. J'y oubliais ma nullité. C’était donc, à court terme, un excellent remède.
Encore aujourd’hui, quand la haine et le mépris que j’ai de moi m’affole trop, j’ouvre une fiction, de préférence sans lien avec mes études. Le soulagement perdure après des milliers et des milliers de pages; je m’annihile dans l’ivrai.

La vie des occidentaux est faite de choix, et de persévérance dans ces choix.
Puisque mon choix le plus persévérant fut la lecture et que, comme on l’a vu, c’était à peine un choix; puisque cette lecture n'avait aucune incidence directe sur ma vie sauf pour l'assimilationd e ces termes superfétatoires ornant ma parole, ornement faisant croire à une intelligence chez moi (artifice pernicieux!); puisque cette activité, ayant très peu de points de contact avec la trame de ma vie, me faisait orbiter à la plus grande distance d’elle possible : on peut dire que l'essence de mon existence est à son minimum. Minimumissima.
Je rédige ces mots, je me rends compte que je suis dans l’erreur.
Il y a en effet des minima bien plus impressionnants, des abstractions d’existences vraiment complètes. Des gens sans amis, sans parents, sans mots, avec des logements vides, des têtes proches de kelvin 0. Des moines bouddhistes à l’abstinence sublime. Des schizophréniques catatoniques. Des autistes.
De tout ceux-là, il n’y a que les moines qui sont ainsi de par leur volonté; les autres son excusables par des tares hors de leur contrôle.
Je n’ai, quant à moi, aucune excuse.
Mon minimum d’existence est remarquable par cette médiocrité des mi-parties qu’il affectionne; il s’abandonne de velléité en velléité, sans jamais sombrer dans la grande dèche noire; les géniteurs secourent alors leurs mol avorton.

Ça n’a pas le charme débraillé des rutilantes épaves héroïques des Réjean Ducharme, des VLB, des autres conteurs des êtres d'exception de la déchéance, revoyez vos jugements sur la réussite, grandeur dans la boue, etc.