25.7.08

Cessez de chiâler.

Ah, ça va faire le bitchage. Arrêtez donc de bitcher! Vous êtes justes des bloggueurs, pas des Académiciens! Vous êtes pas donc' tellement plussse beaux et talentueux et intelligents que tout le monde, là! Toujours la petite critique fatiquante, jamais constructive la critique, qui s'engage dans rien, qui ne se compromet pas, qui prend jamais vraiment position, mais qui trouve quand même le moyen de se mettre au-dessus de tous les autres sales plébéiens que nous sommes, êtres d'élite à l'esprit et aux charmes ineffable! Suffit! Stop! Argh! M'tappez sué' nerfs!

L'INTIMISME; sacrez-y donc la paix! Proust, Céline, Beauvoir, Sarraute, Duras, Ducharme, ça vous dit quelque chose? Tsé là, des géants de la littérature, que ça vous plaise ou non? Y'as tu plus fucking intimiste que ça? Non? Bon! Que d'autres escrivailleurs, comme vous en êtes sauf vot'respect, le pratique et puissent manquer de talent, ne change rien à la validité du médium. Estie.

LE BON GOÛT; vous en êtes pas les détenteurs! Non mais je vous en apprends une bonne, là! Vous êtes kitsch aussi! Vos sujets ne sont pas meilleurs parce que pseudo-sophistiqués ou pseudo-hermétiques!

L'ORIGINALITÉ: vous avez rien inventé non plus! Y'a pas grand chose de neuf sous le soleil, particulièrement pas la pédanterie, la prétention, la fatuité et la croyance ingénue et ridicule que vous feriez sans doute mieux que tout le monde et leurs soeurs. Un peu de bonne foi, ça vous dirait pas, des fois?

Croyez-vous donc les gens si imbéciles qu'ils seraient incapables de voir toute la frustration et l'insécurité que masque fort malhabilement votre insupportable vanité? Pensez-vous vraiment que pisser sur la tête des autres vous confèrerait à vous un délicieux et irrésistible arôme? Trouvez-vous ça bien piquant de faire ce que tout le monde fait, soit être convaincu d'être dans le vrai envers et par devant tous les autres braves gens? Hey! Sortez de la bulle! It's not all about you, câlice!

Non, l'univers ne fonctionne pas selon le mode binaire qui consisterait en "Bon = comme vous Versus Mauvais = Pas comme vous."

NON, VOUS N'ÊTES PAS LE SEL DE LA TERRE.

Aaaaaaaaah... *grand soupir de soulagement*

Vous pouvez maintenant reprendre le cours de vos existences.

signé,*

-Le Poulpe énergumène.



*J'y tiens, à mon malapropiste "signé", bon!
** Ce texte comporte une carence en article négatifs (n', ne.)

23.7.08

Indélicatesse

Je manque souvent de tact par ma littéralité et le spontané de ma franchise. Cela me fait commettre bien des impairs, mais celui d’aujourd’hui bat des records.

Je m’explique.

Aujourd’hui au travail, nous accueillions deux jumeaux de St-***, dont l’un à terme et l’autre mort in utero depuis la 19ième semaine. La grossesse avait été interrompue suite à la découverte que l'enfant était un encéphalocèle. Genre y'avait pas de cerveau qui poussait. Cas imprévu, l’infirmière de transport a ramené la dépouille du féticide afin que notre département de pathologie effectue l’autopsie. Faute de précédents en la matière, la pauvre infirmière ne savait que faire de la petite masse de chair en son placenta. Elle me demande d’appeler en patho, afin que je prenne connaissance de la procédure exacte.

- Où est-ce qu’il est, le bébé?

- Il est dans le placenta, là-dedans, me dit-elle en désignant le petit paquet soigneusement enveloppé dans un sac de plastique noir qu’elle trimballait depuis un moment.

Léger malaise.

Ce genre d’éventualité est évidement assez peu courante, ce qui explique notre confusion à tous.

La conversation avec la commis de patho est allée environs comme suit :

« - Patho, bonjour!

- Ouuuui bonjour, je m’appelle Léa, je suis commis en néonatalogie… Bon je vais tenter de vous expliquer la situation, nous avons eu un transfert de jumeaux de St-***…, dont l’un est vivant et sur l’unité et l’autre mort in utero depuis l’âge de 19 semaines… Et là on sait, euh, pas trop quoi faire avec.

-Attend, attend... Euh… Ben y’est où, là, le jumeau mort?

- Là là? Y’est sur l’unité, mon infirmière de transport l’a din’mains, a’se promène avec comme c’est là. »

Éclats de rire général derrière moi. C’était les résidents qui me trouvaient pas mal comique, bien involontairement il est vrai…

J’étais presque aussi mortifiée qu’amusée aussi par la terrible banalité de quelque chose d’aussi morbide.

La commis de la pathologie a rit aussi.

Elle-même m’a transféré à quelqu’un, qui m’a transféré à une boîte vocale. Comme tout cette histoire n’avançait pas bien vite, l’infirmière, toujours le fœtus sur les bras, me demande :

- Ben là, qu’est-ce que je devrais faire avec ça?

- Ben je sais pas moi, mets-le au frigo?

Avant d’être acheminé à bon port, il s’est ramassé dans un petit bassin de plastique bleu, du type qu’on utilise pour laver nos patients vivants, quelques lingettes sur le dessus en guise de linceul, le tout sur une table dans le couloir. J’avais très peur de regarder à l’intérieur.

21.7.08

Ersatz de Cendrier

Mon cendrier est un étrange petit gobelet en étain, monté sur un pied plus long que son vase, l’ourlet du vase plus large que sa mi-section. Le métal a depuis longtemps perdu le peu d’éclat qu’il a pu avoir à l’origine, où il devait faire office de bibelot, avec une efficacité décorative plus que relative. Je le fait sans cesse basculer lorsque j’avance ma gourde main, à l’aveugle, il s’abat sur le bureau et son contenu poussiéreux à l’odeur vile s'y répand. Je renverse souvent mon cendrier, d’abord il n’est pas conçu pour cet usage, ensuite le long pied compromet sa stabilité. Il est en équilibre constant. Je romps constamment cet équilibre.

Il est indéniable que la lumière d’une lampe réduirait ces déversements de mégots. Cependant, je sais que l’accident occasionnel surviendrait tout de même.

Je persiste à ne pas me procurer un vrai cendrier.

Et à salir mon bureau.

Je ramasse les bouts de clopes, mais pas la cendre.

Je conserve aussi un tas de vétustes factures souillées, froissées, décolorées, toutes parfaitement inutiles, toutes attestant d’une transaction insignifiante, consommée de façon permanente et perd systématiquement toutes les preuves d’achats onéreux qui seraient indispensables à un remboursement ou une réparation.

Tout comme je garde une multitude de bricoles saugrenues. Des montures de lunettes sans branches, des macarons sans épinglettes, des écouteurs sans fiches, des plumes sans encre, des montres sans bracelets ou sans piles, des papiers sans conséquences, des textes sans suites, des dessins sans finition. « Ça peut servir », « C’est intéressant », « Je peux le réparer ». Est-ce mon sentiment de solidarité avec les estropiés qui s’exprimerait ainsi de manière symbolique, frisant la manie?

J’ai de la misère avec le définitif. Plutôt que de trouver le Verbe, je tripote des vétilles.

Lorsqu’il m’arrive de tomber sur une idée tangible lors de mes ergotages internes, toutes les réflexions que j’accumule dans ces longues et tâtonnantes rotations de la conscience me reviennent par à-coup et c’est avec stupeur que je constate que je n’en ai encore rien fait.

Comment change-t-on?

14.7.08

l'abstention

Je suis, au fond, encore un enfant: je me suis jamais sortie de l'ubiquité et du confort du monde des possibles. Agir, c'est se commettre.¹
***
Lire Dharma Bums (Kerouac) et De l'inconvéninent d'être Né (Cioran) en même temps, ça fait un drôle d'effet.
***
Avant, j'aimais beaucoup raconter des histoires, créer des mondes fictifs. Maintenant, je me méfie de la gratuité de l'imaginaire.
Il me semble qu'il est obligatoire d'enchaîner ces fabulations à du solide, à du vrai. Les dialogues doivent provenir de la systématisation de longues observations prises sur le vif; la psychologie des personnages fondées sur leurs histoires, recherchées dans les dernières théories et les laborieux souvenirs, à la méthode proust; l'intrigue ficelée comme du shibari puriste ou des travaux d'aiguilles polonais, infiniment complexe mais harmonieusement amalgamée... Sinon on est naïf et malhabile. Mais il est peut-être mieux de produire des textes naïfs et malhabiles que de se ronger les ongles à vouloir pondre du sublime ou rien du tout.
***

¹(Il me semble que cette phrase là n'est pas de moi...)

9.7.08

Inconforts *dans* le groupe (Vivisection)

Le strass est terni, et l’ivresse n’a plus de suc.

J’ai avalé la boue de trop d’amants.

Ma chair est l’étai de leur plaisir indifférent, mon oreille le puits des milles confidences que peuvent me faire leurs égos précieux, reluisants, bien entretenus de ce fait. On m’établi dans le culte de leur magnificence, en remplacement de la femme digne, qui n’est pas moi. C’est un poste temporaire.

Je me suis vouée à tant de boue glorifiée… Il me semble qu’elle s’est séchée sur moi, dans moi, elle forme une croûte qui gêne tous les mouvements, toute la chaleur.

J’ai la main, la tête si pleine de boue, ce qui passe au travers se confond en un vaste mensonge, quelques autres racontards sans importance.

Il me semble que cette boue, elle s’est tant et si bien infiltrée, qu’elle ne saurait plus être extirpée de moi; elle est indissociable de mon être, maintenant. Je suis cette boue et cela me fait horreur.